Émilie Carr

Emily Carr 1930
Emily Carr, 1930

1871-1945

Emely Carr nait le 13 décembre 1871 à Victoria au Canada. Cinquième enfant d’une famille qui compte cinq filles et quatre garçons dont un seul atteint l'âge adulte, Emily manifeste son indépendance à un jeune âge, critiquant les rituels familiaux de lecture de la Bible, de prières et de fréquentation de l’église. Emily n’a que quatorze ans lorsque sa mère, de qui elle est très proche, succombe à la tuberculose. À la mort de son père deux ans plus tard, la fille aînée, Edith, se charge du soin de la famille. Incapable de tolérer la sévérité de sa sœur, Emily persuade son tuteur, James Lawson, de lui permettre d’aller étudier les beaux-arts à la California School of Design de San Francisco en 1890. Carr qualifie de monotones les cours de dessins de figures anciennes et de natures mortes et a pudeur lui fait exclure le dessin de nus. La situation financière de la famille l’oblige à rentrer à Victoria trois ans plus tard.

Carr commence à donner des cours d’art dans son atelier et après avoir mis suffisamment d’argent de côté, elle entreprend en 1899 un deuxième séjour hors du Canada, cette fois à la Westminster School of Art à Londres. Déçue par la formation conservatrice et l’insalubrité de la capitale anglaise, Emily quitte cette école au bout de deux ans.

Au printemps 1901, Emily Carr fait un voyage de douze jours à Paris où elle visite le Louvre à plusieurs reprises, ainsi que des galeries privées. Il est possible qu’elle y ait vu des œuvres des impressionnistes, des postimpressionnistes et des fauves, notamment Vincent Van Gogh, Claude Monet, Camille Pissarro et Henri Matisse. Elle constate lors de ce bref séjour que Paris est un centre artistique plus important que Londres. Plus tard la même année, elle s’installe à St. Ives, un village de pêche de Cornouailles où est installée une colonie d’artistes. Carr quitte St. Ives au bout de huit mois pour travailler au Meadows Studio à Bushey dans l’Hertfordshire.

De retour à Londres, Emily Carr est continuellement malade et souffre de plus en plus du déracinement. Comme elle tarde à guérir malgré les soins prodigués par ses amis fortunés, on fait venir une de ses sœurs du Canada. En 1903, elle est hospitalisée durant 18 mois parce que l’on a diagnostiqué qu’elle est atteinte d’hystérie, qui à cette époque était un terme fourre-tout pour cataloguer les troubles émotionnels ou mentaux dont pouvaient souffrir les femmes.

Ensuite, Carr regagna la côte ouest du Canada en passant par Toronto et la région de Cariboo en Colombie-Britannique. Découragée par son expérience londonienne qu’elle considère comme un échec, elle commence à enseigner à Vancouver. Ses premières élèves sont des femmes de la haute société qui fréquentent le Vancouver Studio Club and School of Art, et dont l’absence d’engagement artistique la frustre. Elle ouvre par la suite sa propre école d’art pour les enfants, qui connaît un grand succès.

En 1907, Emily a fait un voyage en Alaska avec une de ses sœurs. Elle noircit ses carnets de croquis et de notes pour immortaliser tout ce qu’elles vivent, allant du mal de mer jusqu’à leurs visites des mâts totémiques de Sitka. Profondément marquée par ce voyage, elle se lance dans un projet qui l’occupera pendant cinq ans : peindre et dessiner les villages amérindiens de Colombie-Britannique.

En 1910, Emily Carr retourne à Paris. La formation technique et stylistique qu’elle y acquiert au cours de son séjour de quinze mois transforme son œuvre de manière décisive. Mais comme lors de son séjour à Londres, elle ne parvient pas à s'adapter à la vie en ville. Elle se réfugie dans une station thermale en Suède pendant plusieurs mois, puis revient étudier avec le peintre anglais Harry Phelan Gibb à Crécy-en-Brie à l’est de Paris, pour ensuite se rendre en Bretagne. À l’époque, Gibb peint dans le style des fauves.

Malgré ces interruptions, le travail de Carr s’épanouit et gagne en audace. À son retour au Canada en 1912, elle expose dans son atelier 70 aquarelles et tableaux à l’huile réalisés en France. Après elle se lance dans un nouveau projet avec énergie. Elle entreprend son plus long voyage dans la province de la Colombie-Britannique : les îles du Nord-Ouest, et le cours supérieur du fleuve Skeena.

Elle peint la vie, les villages et les mats totémiques des autochtones, car elle est convaincue que tout cela va bientôt disparaître.

Profondément découragée par l’absence d’intérêt des clients et mécènes de la Colombie-Britannique pour ses œuvres modernes, Emily Carr touchera peu à ses pinceaux au cours des treize années suivantes. À partir de la fin des années 1920, afin de mieux comprendre sa relation à la nature, elle entreprend une quête spirituelle et mystique auprès des cultures amérindiennes, de prêtres hindous, d’artistes chinois expatriés et des philosophes et auteurs humanistes.

Ce n’est qu’à partir de 1927, alors qu’elle est dans la cinquantaine, qu’Emily Carr acquerra une renommée à l’échelle nationale. Elle est invitée à participer avec 26 tableaux à une exposition à la Galerie nationale du Canada à Ottawa (aujourd’hui le Musée des beaux-arts du Canada) ou elle est accueillie favorablement parmi les peintres plus connus du Groupe des Sept.

Carr est invitée à exposer avec le Groupe des Sept en 1930 et en 1931 puis, après la dissolution du groupe, elle adhère au Canadian Group of Painters. Ces relations, et plus particulièrement son amitié avec Lawren Harris, la stimuleront, tout comme un voyage qu’elle réalise en 1930 à New York où on lui présente Georgia O’Keeffe. Ses rapports avec certains artistes locaux, dont le jeune peintre britanno-colombien Jack Shadbolt et un artiste chinois, Lee Nam, lui seront utiles et la soutiendront pour le reste de sa carrière, même si elle demeure à Victoria, loin de l’activité artistique. Toutefois, l’inclusion de ses œuvres dans des expositions de groupe à la Tate Gallery de Londres en 1938 et à l’Exposition universelle de New York l’année suivante marqueront son entrée sur les scènes nationale et internationale.

Carr expérimente plusieurs styles au cours de sa longue carrière, et son art s'apparente aux tendances du modernisme de la première moitié du vingtième siècle. Même si elle a pu être influencée par le postimpressionnisme, le fauvisme, le cubisme, le futurisme et l'abstraction, elle ne mène jamais à bout aucune de ces démarches, même si, à l'époque, on la tient toujours pour radicale dans la Colombie-Britannique conservatrice.

Emily Carr, Zunoqua du village aux chats
Zunoqua du village aux chats
1931
Huile sur toile, 112,2 x 70,1 cm
Vancouver Art Gallery, Canada
Emely Carr, Souches et rebuts
Souches et rebuts
1939
Huile sur toile, 67,4 x 109,5 cm
Art Gallery of Greater Victoria, Canada
Emely Carr, Au-dessus de la carrière
Au-dessus de la carrière
1937
Huile sur toile, 77,2 x 102,3 cm
Vancouver Art Gallery
Emily Carr, Femmes bretonnes
Femmes bretonnes
1911
Graphite, aquarelle sur papier, 44,5 x 54,6 cm
Vancouver Art Gallery
Liens : Dictionnaire biographique du Canada Carr, Emily
Source : Emely Carr, sa vie et son œuvre de Lisa Baldissera - Institut de l'art canadien